Ces sommes seront empruntées sur les marchés financiers. Personne ne peut souhaiter que le système bancaire fasse faillite car les conséquences sur l’économie réelle, et donc sur les salariés et leur emploi, seraient considérables. Mais, la nature des plans proposés pose problème.
Des milliers de milliards pour les banques sans contreparties
Les plans d’aide aux banques fonctionnent suivant la logique de la socialisation des pertes et de la privatisation des profits. Dans le cas des nationalisations partielles, il s’agit d’assainir les banques par des fonds publics avant de les reprivatiser pour le grand bénéfice de leurs actionnaires. Le plan français caricature encore cet aspect, refusant toute entrée dans le capital. Certes les fonds versés sous forme de « dette subordonnée » doivent être remboursés avec un taux d’intérêt relativement élevé, mais les banques peuvent en déduire une partie de leur impôt.
Ne pas entrer dans le capital permet aussi de ne pas diluer le bénéfice net par action. Cela est donc une mesure qui profite aux actionnaires. Mais surtout, ce refus de rentrer dans le capital des banques prive le gouvernement de tout moyen de peser dans les décisions de celles-ci. A sa décharge, on peut constater que l’entrée dans le capital faite en Grande-Bretagne n’a pas été particulièrement efficace pour faire changer le comportement des banquiers.
Les banquiers ne changent pas de comportement
Les banques refusent de se prêter de l’argent pour leurs opérations au jour le jour, n’ayant absolument pas confiance les unes dans les autres. Immédiatement, les plus fragiles voient leur situation s’aggraver considérablement. Anticipant la récession, les banques restreignent leurs crédits aux entreprises et aux particuliers, contribuant ainsi à aggraver la situation économique. Cette crise du crédit n’est pas une crise de liquidité, mais une crise de disponibilité de la liquidité liée à l’aversion pour le risque. En Europe, les banques déposent à la Banque centrale européenne (BCE) des centaines de milliards d’euros - le 9 janvier 2009, 313 milliards ont été déposés à la BCE - qui sont ainsi sécurisées et rémunérées. Le phénomène est tel que la BCE a baissé le taux de rémunération de ces fonds qui est passé de 1,5 % à 1 %.
Pour un service public bancaire
Face à la crise, on ne peut plus laisser les banques continuer à fonctionner pour le plus grand profit de leurs actionnaires. Il faut mettre en place des outils pour financer l’activité économique dans un sens socialement et écologiquement utile. La stabilité financière, le financement des activités productives, la monnaie sont des biens publics qui ne doivent pas être appropriés par des intérêts privés. Les banques doivent donc être dé-privatisées pour les mettre au service de l’intérêt général.
La dé-privatisation des banques ne peut pas prendre la forme d’une simple nationalisation des banques telles qu’elles sont. Il faut socialiser le système bancaire, c’est-à-dire le refondre pour le mettre au service et sous le contrôle de la collectivité. Les nouvelles institutions bancaires ne doivent pas être en concurrence les unes avec les autres, mais doivent fonctionner sur un mode coopératif. Services publics, elles doivent être placées sous le principe de non-profitabilité. La propriété juridique de ces institutions ne doit pas être étatique, mais doit relever d’un mode proche de l’économie sociale et solidaire.
L’organe de contrôle de ces banques devrait être composé de telle sorte que la société dans son ensemble y soit représentée : représentants des pouvoirs publics à tous les niveaux, des usagers des banques par l’entremise d’associations de consommateurs pour les ménages, des représentants des entreprises en particulier les PME, des syndicats des salariés des banques et des unions interprofessionnelles, des associations écologistes... Il s’agit donc de transformer et de démocratiser radicalement le système bancaire qui devrait, de plus, être strictement encadré par une réglementation sévère.
Face à une crise économique qui s’aggrave, et qui risque de rebondir encore sur la sphère financière, alors que les gouvernements pratiquent, sous une forme ou une autre, la socialisation des pertes, la perspective d’un service public bancaire est à l’ordre du jour.
Et les déficits publics ?
Jusqu’à encore très récemment, les pouvoirs publics affirmaient que les caisses étaient vides et qu’il était impossible d’accroître le déficit public. On a même entendu le Premier ministre clamer haut et fort que “l’Etat était en faillite”. Et puis la crise est arrivée, et les milliards se sont mis à tomber sur les banques et les entreprises. Le déficit budgétaire et la dette publique se sont envolés car ces milliards ont été empruntés sur les marchés financiers.
Au-delà de l’hypocrisie qui consiste à refuser toute avancée sociale au nom de la lutte contre le déficit et de l’oublier dès qu’il s’agit de faire des cadeaux au patronat, il s’agit d’une question importante. En effet, c’est l’argent de nos impôts d’aujourd’hui qui paie cette dette et ce sont les rentiers, qui ont les moyens d’acheter des bons du Trésor, qui en profitent.
Il y a pourtant un moyen qui éviterait d’emprunter ces sommes sur les marchés financiers. Cela consisterait à ce que la Banque centrale européenne (BCE) finance les Etats par de la création monétaire. Certes cela créerait de l’inflation qu’il faudrait maîtriser. Mais un peu d’inflation aurait l’énorme avantage de réduire l’endettement de tous les acteurs économiques, Etats, entreprises et ménages... et de réduire les intérêts de ceux qui vivent de leurs rentes financières.
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